AI Overviews : l'arrivée en France se précise

AI Overviews : l'arrivée en France se précise Des questions demeurent, notamment sur l'application du DSA, du DMA et du RGPD.

Si la Search Generative Experience, était restait bloquée à quai en Europe, son successeur, AI Overviews, semble passer les obstacles. Les AI Overviews ont en effet été lancés il y a quelques jours en ligne en Allemagne, Belgique, Irlande, Italie, Autriche, Pologne, Portugal, Espagne, et en Suisse. La firme de Mountain View a précisé : "à la suite de tests approfondis et d'un retour d'information positif de la part des utilisateurs, les utilisateurs connectés âgés de plus de 18 ans dans ces pays verront désormais les aperçus d'IA apparaître lorsque nos systèmes détermineront qu'ils sont les plus utiles, avec des liens en évidence vers le web pour que les gens puissent facilement en savoir plus."

L'explication de ce revirement pourrait en partie résider dans le fait que le flou juridique lié auparavant à la SGE ait en partie disparu avec les AI Overviews. Même si certaines interrogations demeurent. Notamment concernant le DSA, censé combattre les contenus illicites, dangereux et préjudiciables sur Internet. Gaël Mahé, avocat en droit du numérique, révèle : "au-delà du manque de fiabilité des réponses apportées, le but de la SGE était de générer des réponses détaillées et interactives. Tandis que les AI Overviews ne se contentent à ce stade que de réponses simples et synthétiques." Au vu de son nombre moins élevé d'hallucinations et du peu de requêtes sur lesquelles elles s'affichent actuellement, les AI Overviews seraient peut-être plus susceptibles de respecter le DSA que la SGE.

"Attention toutefois, car les AI Overviews peuvent parfois produire des erreurs", rappelle Anthony Bem, avocat fondateur du cabinet Bem. "Google semble avoir renforcé ses garde-fous, avec un filtrage accru des fake news par exemple, mais le risque juridique persiste en cas de diffusion d'informations non vérifiées." De son côté, la Commission de protection des données irlandaises, nous a exprimé avoir " constaté que Gemini, qui est utilisé par les AI Overviews, synthétise des informations déjà disponibles sur Google Search, bien qu'elles soient présentées dans un format différent." Et indique "continuer à surveiller cette fonctionnalité au fur et à mesure de son déploiement dans l'UE/EEE."

Autres volets juridiques, le DMA et le RGPD. Rappelons que le DMA doit amener davantage de concurrence dans les services numériques. Le RGPD quant à lui encadre le traitement des données sur tout le territoire de l'Union européenne. Selon Gaël Mahé, le fait que les AI Overviews soient intégrés de manière plus fluide dans la recherche classique permet de les rendre plus facile à cadrer juridiquement. "Même s'il faudra déjà voir comment cela va se traduire ultimement, cela peut notamment faciliter la transparence envers les utilisateurs, à travers une meilleure compréhension des traitements de données ou encore "moins" invisibiliser les sites indexés", estime-t-il.

"Les AI Overviews semblent correspondre mieux aux attentes de l'Europe sur certains points, telle une meilleure attribution des sources", confirme Anthony Bem. "Néanmoins, la neutralité algorithmique reste contestée, avec un risque d'auto-préférence. La mise en avant de réponses génératives pourrait réduire le trafic vers les sites médias, ce qui inquiète les régulateurs. Le droit à l'information des utilisateurs quant à lui n'est pas encore totalement satisfait."

Eva Zimmermann, porte-parole de l'Autorité de protection des données de Hambourg, dévoile d'ailleurs que les AI Overviews posent encore question en Allemagne concernant le RGPD. "Leur utilisation dans notre pays doit, comme tout système d'IA en Europe, être mesurée à l'aune des dispositions et exigences du Règlement général sur la protection des données. En particulier, des processus doivent également être mis en place pour garantir l'exactitude des données fournies pour correspondre aux exigences de l'article 5, paragraphe 1, point d du RGPD. Les questions pertinentes en suspens sont en outre de savoir si l'entraînement de l'IA utilisée est conforme aux exigences du RGPD, si l'interaction de l'utilisateur doit également être utilisée pour son entraînement et s'il sera possible d'utiliser le moteur de recherche Google même sans cette fonction."

Autre élément à noter concernant la facilitation de l'implantation des AI Overviews en Europe, certains compromis accordés par la firme de Mountain View directement avec les autorités locales. "Il est possible que Google ait négocié directement avec ces autorités, en leur fournissant des garanties sur la manière dont les AI Overviews sont déployés et en effectuant des tests sécurisés et encadrés", pointe Gaël Mahé.

Une nécessaire transparence en France

Compte tenu de la logique juridique, Gaël Mahé pense que les AI Overviews ont de grandes chances d'arriver prochainement en France. "En prenant en compte le RGPD et le DMA, sous réserve de potentielles variantes liées au droit local des différents Etats membres, aucune raison ne semble a priori prévenir Google de déployer la version finale de son IA en Italie ou en Allemagne et non en France."

Mais le géant américain devra certainement se plier à certaines exigences en France, pour apparaitre davantage en conformité avec la législation européenne. Pour Gaël Mahé, "il est possible d'anticiper certains points de régulation qui devront, de toute manière, être mis en place par Google, si cela n'a pas déjà été fait lors des expérimentations précédentes dans d'autres pays de l'UE. A ce titre, sur le plan du RGPD, un point clef sera la transparence, avec une communication claire sur les sources d'informations utilisées et sur les mécanismes de fonctionnement de l'IA, mais aussi sur les traitements des données personnelles de l'utilisateur, avec les prompts, l'historique ou encore les statistiques.

En outre, afin de rendre libre le consentement de l'utilisateur, Google devrait offrir un moyen simple de retirer son consentement à l'utilisation d'AI Overviews. Pour cela, il devra faciliter sa désactivation et permettre ainsi aux utilisateurs de revenir à une expérience classique du moteur de recherche sans IA." On sait aussi que le problème des droits voisins peut poser problème dans l'hexagone. Cette loi vise à garantir aux médias une rémunération pour la réutilisation de leurs contenus par les plateformes numériques. Google a été de nombreuse fois condamné sur ce sujet. Sollicitées sur différents points, la CNIL et l'autorité de la concurrence n'ont pas souhaité nous en dire plus. Indiquons que la première a dévoilé le 7 février dernier, ses nouvelles lignes directrices sur l'utilisation responsable de l'intelligence artificielle. Les principes du "privacy by design" et "by default" restent incontournables, tout comme la transparence. "Nous devrions voir dans les prochains mois arriver les nouvelles lignes directrices de l'UE sur l'IA dans les moteurs de recherche", souffle Anthony Bem. 

Rappelons que si les AI Overviews ne respectent pas les dispositions du RGPD, comme l'absence de transparence sur la collecte de données, le non respect du consentement ou les traitements non licites, Google s'expose à des sanctions allant jusqu'à 4% de son chiffre d'affaires mondial annuel.