Andréa Bensaid (Eskimoz) "Eskimoz aimerait devenir la première licorne française à ne jamais avoir levé des fonds"

Le CEO de l'agence SEO détaille sa stratégie et fait le point sur les tendances du marketing digital. Au menu : l'IA avec modération et l'UGC comme avenir de la publicité sociale.

JDN. Vous analysez avec beaucoup de prudence l'emploi de l'intelligence artificielle dans les rédactionnel web. Pourquoi ?

Andréa Bensaid est le fondateur et CEO d'Eskimoz. © Eskimoz

Andréa Bensaid. Le grand public découvre le potentiel de l'intelligence artificielle pour le rédactionnel avec OpenAI et ChatGPT-3, outil qui commence en effet à procurer des résultats très intéressants. Beaucoup de gens vont cependant se précipiter sur ces nouvelles technologies pour générer automatiquement leurs contenus web. Mais sans une utilisation modérée de ces outils, ces personnes risquent gros. La raison est que l'algorithme de Google est suffisamment fin pour détecter la différence entre un contenu produit par un humain et un article fait par l'intelligence artificielle. Les sites ayant abusé de l'intelligence artificielle pourraient être pénalisés par Google. Il faut donc s'en servir à bon escient, en retravaillant le contenu avec de vrais rédacteurs et de l'originalité.

Quelle autre tendance forte agite le marketing digital en ce début d'année ?

Nous vivons une époque où le temps d'attention a chuté drastiquement sur les réseaux sociaux. La seule manière pour les marques d'augmenter vraiment leurs chances d'attirer l'attention des utilisateurs, et notamment de la gen Z, est de recourir à l'UGC (user generated content). Ce sont des contenus faits par des micro-influenceurs certes créatifs mais dont le trait commun est leur quasi spontanéité, leur naturalité et leur proximité avec les gens. Les utilisateurs en ont assez des grands influenceurs.

"Les utilisateurs en ont assez des grands influenceurs"

En 2015 Eskimoz enregistrait 150 000 euros de chiffres d'affaire ; en 2022, 20 millions, avec au passage l'acquisition de deux sociétés européennes sur fonds propres. Comment expliquez-vous ce développement ?

J'ai lancé Eskimoz en 2010. J'avais alors 22 ans et je venais de finir mes études. J'ai investi 2 000 euros dans cette entreprise et je n'ai jamais mis euro supplémentaire. Ma société est une preuve vivante du fait qu'il est possible de se développer sans pour autant devoir recourir aux fonds d'investissement. Rentables depuis 2015, avec 150 collaborateurs nous accompagnons près de 500 clients dont 350 environ en France (parmi lesquels Franprix, Bouygues Immobilier et le Crédit Agricole, ndlr.). Ce qui explique cette performance je pense, au-delà de la qualité du service délivré, c'est tout simplement notre capacité à retenir à la fois nos collaborateurs et nos clients. Pour une société de conseil, cette longévité des collaborateurs est essentielle : c'est ce qui lui permet de construire une relation avec ses clients dans la durée. C'est aussi la raison pour laquelle nous avons décidé de lancer une école de SEO. Un autre facteur qui favorise notre développement est sans doute notre ouverture à l'international. A terme, nous aimerions devenir la première licorne française à ne jamais avoir levé des fonds.

Vous multipliez les ouvertures de bureau et rachats en Europe. Cette diversification géographique s'accompagne-t-elle d'une diversification de votre métier ?

Nous avons en effet ouvert un bureau à Madrid en 2020 et acquis en 2022 la société italienne  Sembox et l'agence anglaise Digital Uncut. Cette année nous allons acquérir une société très importante en Allemagne : si cette opération se réalise, nous changerons de dimension. En France nous sommes présents à Paris et à Lyon et sans doute bientôt à Bordeaux. Cette expansion géographique n'implique pas une diversification de notre métier, qui avait déjà évolué. Notre métier historique et principale source de revenus reste le conseil en SEO pour que nos clients puissent se positionner en première place sur Google. Mais nous avons aussi ouvert trois autres pôles de services : la production de content marketing, le pôle paid (Google Ads et social) et le pôle data et tracking pour la mesure des performances des campagnes. Ces nouveaux pôles nous servent de relais de croissance. Tous ces métiers devraient générer des revenus à des niveaux équivalents assez rapidement.