HelloFresh, Jow, Les Commis : le panier-repas continue de faire recette
Arrivées pour la majorité après 2017 en France, les entreprises de paniers repas à cuisiner ont connu une forte croissance pendant la crise du coronavirus. Depuis, l'intérêt ne s'est pas démenti, et même grandit. Selon le rapport Digital 100 de Similarweb, Les Commis, Hellofresh et Jow, ont enregistré une hausse de leurs audiences de 47% en moyenne en 2023 par rapport à 2022. "La tendance à prendre davantage de repas à la maison s'est considérablement accélérée et nous considérons chez Hellofresh que la majorité des facteurs clés sous-jacents - augmentation du travail à domicile, sensibilité aux prix et souci de durabilité - sont devenus permanents", explique Martin Pollet, directeur général France.
Des repas entre 7 et 9 euros
Hellofresh rassemble chaque mois en France 359 000 visiteurs uniques selon Similarweb. Son modèle d'abonnement : une liste de repas à sélectionner pour la semaine, la livraison des ingrédients nécessaires et des recettes pour les cuisiner. Forte de son succès depuis 2018, la société allemande, aux plus de 7 milliards d'euros de CA annuel (60% aux USA) en 2022, a installé un nouvel entrepôt au sud de Paris en mars 2023.
L'abonnement à une box pour deux personnes avec quatre repas est facturé 57 euros, soit 7,1 euros par couvert. Une formule qui correspond au panier moyen sur le site qui se monte à 56 euros en 2022, en progression de 10% sur un an. L'offre d'Hellofresh est en outre souvent accompagnée de promotions : le marketing (17% du CA) est le troisième poste de dépenses du groupe après l'approvisionnement et la logistique. En 2022, Hellofresh a traité 125 millions de commandes sur ses onze marchés dans le monde.
Côté rentabilité financière le groupe se porte bien malgré un léger impact de l'inflation en 2022 avec une marge d'EBITDA en recul de 2,5 points sur un an, passant de 8,8% à 6,3%. Pour expliquer son succès, Martin Pollet, directeur général de Hellofresh France, vante le modèle commercial direct au consommateur et l'agilité de la supply chain du mastodonte : "Nous avons mis en place notre propre flotte de livraison réfrigérée, que nous développons en permanence", illustre-t-il.
Dans cette même logique d'abonnement sans engagement avec des paniers repas à cuisiner dans la semaine, Les Commis a vu son audience croître de 56% avec 62 000 visiteurs uniques par mois. Beaucoup plus petit qu'Hellofresh avec 7 millions d'euros de CA en France en 2022, le site propose des paniers constitués à 95% de produits français et une grande part de produits bio. Un positionnement renforcé depuis le rachat, en septembre 2022, de leur concurrent Rutabago spécialisé dans le 100% biologique.
"Nous livrons en moyenne 20 000 couverts par semaine", confie son cofondateur Cyril Francin. La TPE facture le panier de quatre repas pour deux personnes 71 euros, soit 8,9 euros par couvert. "Le prix de la traçabilité", selon Cyril Francin, qui s'approvisionne directement chez le producteur pour la viande bovine ou le quinoa, par exemple. Les produits sont livrés dans l'entrepôt de la société à Gennevilliers d'où partent les repas. 80% des colis sont à destination de clients récurrents (surtout des familles avec une formule de 4 repas pour 4 personnes).
A la différence d'Hellofresh, Les Commis sous-traite l'entièreté de la livraison au client final, hors région parisienne, à Chronofresh (camion réfrigéré de Chronopost). "Notre problématique est d'amortir le cout de livraison au client final", explique Cyril Francin. En moyenne, la livraison coûte entre 15 et 20 euros par commande. "Cela nous oblige à avoir des volumes d'ingrédients par colis importants pour éviter que le client ait l'impression de ne payer qu'une livraison, détaille le CEO. Pour notre cœur de cible (une famille avec deux enfants, ndlr), le colis par semaine est facturé en moyenne une centaine d'euros donc le prix de livraison reste acceptable."
Pendant le covid-19, Les Commis a vu son volume d'affaires multiplié par deux. "Si nous sommes sortis de cette période, la croissance est toujours là, assure le cofondateur. Il y a un vrai besoin de varier les repas et d'alléger la corvée de courses chez les consommateurs".
Les enseignes comme partenaires
Alléger la corvée de course est également la mission de Jow depuis cinq ans. En croissance de 40% entre 2022 et 2023, l'audience de la start-up française atteint 232 000 visiteurs uniques par mois en moyenne. "En cinq ans, nous sommes passés de 0 à plusieurs centaines de millions d'euros de volume d'affaires" en France, indique Jacques-Edouard Sabatier, CEO de Jow. Depuis l'année dernière, l'application est aussi disponible aux Etats-Unis. Concernant la croissance du chiffre d'affaires, entre 2020 et 2021, elle environnait les 300%. Depuis deux ans, elle oscille entre 50 et 100%.
Tout comme Hellofresh ou Les Commis, Jow propose la livraison de repas à cuisiner, mais sans supporter la logistique. L'application demande au consommateur de sélectionner son supermarché, de choisir ses recettes personnalisées puis de finaliser l'achat des ingrédients présélectionnés sur le site e-commerce de l'enseigne pour se faire livrer ou récupérer son panier en drive. Avantage du modèle ? Les prix sont ceux du supermarché, environ 2,1 euros par couvert. Inconvénient ? Les proportions ne sont pas sur-mesure bien que le panier intelligent mutualise au maximum les ingrédients entre les repas.
"Jow, c'est jusqu'à 1,2 million de couverts par semaine selon la saison"
Pour se rémunérer, l'application récupère une commission d'affiliation (moins de 10%) sur chacune des commandes envoyées aux enseignes partenaires. Une partie de son modèle repose aussi sur la publicité "shoppable" avec des recettes sponsorisées (sauce au yahourt avec Danone par exemple). La dernière source de revenus de l'application sont les frais de service, de 99 centimes, compris lors de chaque transaction effectuée. "Ces trois sources de revenus sont à peu près équilibrées en trois tiers", explique Jacques-Edouard Sabatier. "Jow, c'est jusqu'à 1,2 million de couverts par semaine selon la saison", poursuit-il.
Contrairement aux autres acteurs comme Hellofresh, Les Commis ou Quitoque, Jow se veut très grand public avec des recettes plus rapides pour accompagner les Français quotidiennement. "Notre approche est d'aider à bien se faire à manger et non pas d'apprendre à cuisiner", résume Jacques-Edouard Sabatier. L'application compte six millions d'inscrits en 2024, avec un taux de rétention de 50%. La moitié des utilisateurs utilisent l'application en "nomade" (ils vont en supermarché physique avec la liste de course digitale). Pour l'autre moitié dont le parcours est 100% online, la fréquence de commande est de deux par mois. Selon le fondateur de Jow, le panier moyen est similaire à celui en supermarché, soit autour de 100 euros.
A noter que la grande distribution a identifié le potentiel d'une liste de courses à partir d'un choix de recettes pour booster son activité e-commerce dans l'alimentaire. En juin dernier, Carrefour a lancé Hopla, son chatbot dopé à GPT, pour faciliter les courses des consommateurs avec la génération de recettes personnalisées.