Quel sera l'impact de l'IA générative sur les applications ?
L'intelligence artificielle générative va se généraliser et gagner tous les logiciels. Un mouvement largement amorcé par Microsoft.
Suite à l'avènement de ChatGPT fin 2022, l'IA générative s'est mue en lame de fond. Conscients de son potentiel, les éditeurs de logiciels comme les entreprises se saisissent du sujet et planchent activement sur son intégration. Principale conséquence : une modification profonde des applications se dessine à l'horizon. La gen AI promet de largement modifier la manière d'interagir avec elles et d'accéder aux données. C'est l'intégralité de l'interface homme-machine (IHM) qui se retrouve impactée.
L'IA générative s'immisce déjà dans les principales plateformes du marché. Le moteur de recherche Bing de Microsoft intègre ChatGPT depuis mars 2023. Baptisé Bing ChatGPT, le nouveau service est accessible depuis la barre de tâches de Windows 11 mais aussi depuis celle du navigateur Microsoft Edge. Pris de court, Google planche toujours sur l'intégration de sa propre IA générative, Bard, à son moteur de recherche.
Même logique côté suites de productivité. Microsoft déploie son assistant Copilot dans Office... quand Google commence à intégrer Duet à Google Workspace (lire l'article Avec l'IA générative, la digital workplace va bouleverser jusqu'aux modèles des entreprises).
Des bulles conversationnelles en cascade
"Les bulles de dialogue s'inspirant de ChatGPT vont se généraliser dans toutes les applications", anticipe Charlotte Zekraoui, senior manager au sein du cabinet de conseil digital français Saegus. La consultante prend l'exemple de Notion. La plateforme de travail tout-en-un intègre depuis le début de l'année un assistant. Baptisé Notion AI, il est taillé pour optimiser les contenus déjà rédigés, en termes d'orthographe, de ton, de taille de contenu. Il est aussi conçu pour réaliser des synthétises.
"L'IA générative ne prendra pas systématiquement la forme de bulle conversationnelle"
Au sein des applications, les IA génératives se présenteront a minima comme des bots taillés pour guider les utilisateurs dans leur navigation. "N'oublions pas que l'un des tous premiers cas d'usage de la gen AI réside dans le support client", rappelle Ashutosh Kulkarni, CEO de la plateforme de données Elastic.
"L'IA générative ne s'érige pas toujours en bulle conversationnelle", s'inscrit en faux Bastien Le Lann, directeur au sein du cabinet de conseil Lecko. "Prenons l'exemple de Microsoft Copilot. Il prend des contours divers en fonction de l'application Office où il s'intègre." Au sein du réseau social Viva Engage par exemple, Copilot s'adapte finement au contexte d'usage. "Il se matérialise en deux zones principales. L'une accueille des suggestions de texte, de tags et de mots clés en fonction du sujet abordé. L'autre dresse la liste des commentaires que le contenu du post pourrait générer, en se basant sur l'historique de ceux postés sur des sujets similaires", détaille Bastien Le Lann.
Au sein de Teams, Copilot se matérialise par un flux conversationnel prenant en charge diverses invites : "Lister les questions à poser pour faire avancer la réunion", "Créer un tableau des idées abordées avec leurs avantages et inconvénients", "Etablir une liste des actions à entreprendre suite à la discussion", "Dresser la liste des questions non-résolues", etc. Dans Word, c'est encore différent. Copilot se niche au sein d'une fenêtre s'affichant directement dans le corps du fichier. Une interface taillée pour créer une première ébauche de document ou développer un texte déjà saisi. Pour les actions plus annexes, telles que les synthèses ou la recherche de contenu associé, Copilot s'affiche en parallèle dans la colonne de gauche du logiciel, celle historiquement dédiée à la correction orthographique.
"Dans Powerpoint, une icône sous forme de baguette magique vous permet de générer des images de slide automatiquement", complète Charlotte Zekraoui. "Ce type d'icônes faisant référence à la magie commence à se démocratiser pour désigner les fonctions de gen AI. On les retrouve dans Notion, mais aussi dans Photoshop pour activer son module d'IA générative Firefly."
Urbaniser l'IA générative
Au sein des entreprises, le déluge d'IA génératives pourrait se traduire par une multiplication des assistants intelligents. Salesforce, Oracle, SAP… Tous les ténors des applications métier ont annoncé le développement d'assistants conversationnels basés sur cette technologie. Objectif : donner les moyens de générer divers contenus en exprimant sa demande en langage naturel. Exemples : un mail de relance client côtés ventes, un guide personnalisé d'utilisation d'un produit côté service client, une landing page côté marketing, un rapport comptable côté finance, etc. "Idéalement, il sera préférable qu'une entreprise se fédère autour d'un assistant de référence", souligne Charlotte Zekraoui chez Saegus.
La multiplication des IA génératives pourrait ainsi donner lieu à l'émergence de nouveaux chantiers d'urbanisation informatique. "Mais toute les entreprises ne seront pas logées à la même enseigne. Les groupes très silotés en termes applicatif auront plus de mal. A l'inverse, les entreprises dotées d'un système d'informations plus homogène auront plus de facilité à aller dans ce sens", reconnaît Charlotte Zekraoui. La consultante prend l'exemple d'Airbus qui a déployé un assistant conversationnel à base de gen AI pour répondre aux questions RH de ses salariés. LVMH qui compte 28 tenants Microsoft devra mécaniquement jongler avec plusieurs implémentations de Copilot, à la différence de L'Oréal dont le système d'information s'articule autour d'un tenant Microsoft unique.