Cyril Bourgois (RelevanC) "Le nouvel ensemble RelevanC a généré 67 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2019"
Casino rapproche ses activités de fidélisation et média dans un ensemble qui réunit près de 120 collaborateurs. Son directeur général nous dit pourquoi.
JDN. Vous réunissez votre filiale média RelevanC et MaxIt, l'entité à l'origine du développement de votre application de fidélité Casino Max. Pourquoi ?
Cyril Bourgois. Nous avons décidé de rapprocher ces deux entités car nous observons qu'à l'ère de la data, de la performance et de la mesure, le média et le CRM sont en train de converger. Les actions de fidélisation permettent de collecter de la donnée qui facilite le ciblage publicitaire. Et cette donnée permet de recruter plus de nouveaux clients. C'est un cercle vertueux.
Ce nouveau pôle, qui garde le nom de RelevanC, a pour mission de commercialiser la data du groupe Casino et de ses marques, dans le cadre d'animations commerciales et de campagnes médias. Il rassemble près de 120 experts dont des marketeurs qui opèrent de la data, des équipes commerciales, des développeurs et des UX designers. Il réunit près de 33 millions de profils d'acheteurs, qu'ils soient des utilisateurs logués à nos sites e-commerce, dont Cdiscount, ou des porteurs de cartes de fidélité Casino, Franprix ou Monoprix. L'activité a permis de générer un chiffre d'affaires de 67 millions d'euros en 2019, en hausse de 50% par rapport à l'année précédente. La croissance devrait être au même niveau en 2020.
Sur ces 33 millions de profils, combien sont présents online et offline ?
Nous ne communiquons pas sur ce chiffre qui évolue chaque semaine. Mais je peux vous dire qu'il est de l'ordre de plusieurs millions. L'enjeu, c'est clairement d'augmenter ce nombre pour être capable de suivre le plus de clients possible, entre le on et le offline, et de les toucher indifféremment en magasin ou via le digital. Cela implique un gros travail d'onboarding, avec des partenaires spécialistes de la data, et un élargissement de notre base d'encartés, en renforçant nos actions de fidélité.
Combien sont-ils aujourd'hui à utiliser votre application de fidélité Casino Max ?
"L'utilisateur de Casino Max dépense 20% de plus que ce qu'il dépensait avant d'avoir l'application"
20% du chiffre d'affaires des supermarchés et hypermarchés Casino est réalisé par des utilisateurs actifs mensuels de l'application. Le ratio a doublé en l'espace d'un an, avec un pic de 25% à l'occasion du Black Friday. L'évolution est la même pour la proportion d'utilisateurs qui ont eu recours à un coupon chaque mois. Le client utilisateur de Casino Max dépense 20% de plus que ce qu'il dépensait avant d'avoir l'application, à période comparable. Cela s'explique par une hausse du panier moyen, liée à la personnalisation des offres, et une fréquence accrue de visite, liée à la générosité de nos offres.
La digitalisation nous offre une grande souplesse par rapport aux promotions papier. On peut décider le jour même des actions à mener et la prise de décision peut même s'opérer du côté des chefs de rayon depuis le lancement d'une application dédiée. Le dispositif a été testé en 2019 à Pessac et permet à un chef de rayon de créer lui-même des offres de coupons pour les produits qui approchent de leur date de péremption. Cela permet, en outre, de réduire le gaspillage alimentaire.
Vous avez lancé une offre d'abonnement depuis le mois de juin (10 euros par mois pour obtenir un rabais de 10 % sur les courses). Ça donne quoi ?
C'est trop tôt pour vous donner des chiffres mais ça marche très bien. Nous avons lancé un abonnement mensuel, à 10 euros, et un autre annuel, à 90 euros, pour bénéficier de ces 10% de réduction sans plafond. Cette générosité est compensée par l'augmentation de la fréquence des visites et de la taille du panier. C'est au fond la même stratégie qu'Amazon et cela incite le client à rester chez nous. Je pense que nous avons visé juste car Tesco a lancé un programme équivalent au Royaume-Uni quelques mois après.
Vous évoquez Amazon, avec lequel les distributeurs français sont aujourd'hui défavorablement comparés en matière de retail média. La plupart des agences expliquent que le géant de l'e-commerce propose une offre beaucoup plus aboutie…
C'est effectivement un discours qu'on entend souvent mais nous disposons de véritables atouts face à Amazon. A commencer par la qualité de nos données, dans le secteur alimentaire notamment, où Amazon est, mis à part avec Prime Now, assez peu présent. Sur la partie non-alimentaire, c'est bien évidemment beaucoup plus difficile de rivaliser mais à défaut d'être une alternative, notre site Cdiscount me semble être, de loin, l'offre la plus complémentaire à Amazon et la plus crédible en matière de reach.
"Face à Amazon, les distributeurs vont devoir s'allier"
C'est évident, en revanche, que nous avons des efforts à faire en ce qui concerne la simplicité d'accès à nos offres. C'est cette plateformisation qui fait le succès d'Amazon. Nous avons beaucoup travaillé là-dessus, pour donner plus d'autonomie aux clients. Ils peuvent gérer eux-mêmes leurs actions de CRM au sein de nos applications mobiles. Et nous voulons leur permettre de faire de même pour l'achat média hors de nos environnements dans le courant du 1er semestre.
Cette plateformisation peut-elle passer par des alliances data entre distributeurs ?
Il va falloir y réfléchir si nous voulons proposer aux acheteurs un reach intéressant. Aucun distributeur n'est à ma connaissance capable de toucher 45 à 50% des Français à lui tout seul. C'est indispensable pour peser davantage et capter plus de budgets médias. Face à Amazon, les distributeurs vont devoir s'allier. Nous allons également commercialiser nos briques technologiques en marque blanche, chez d'autres distributeurs français et étrangers, en mode SaaS. Pour avoir discuté avec de nombreux distributeurs, je peux vous assurer qu'il y a un véritable besoin auquel nous pouvons répondre au vu de notre maturité sur le sujet.