Portées par l'IA (et les fonds étrangers), les infrastructures cloud de la France vont changer de dimension

Portées par l'IA (et les fonds étrangers), les infrastructures cloud de la France vont changer de dimension Les Emirats arabes unis mettent 30 à 50 milliards d'euros sur la table. De son côté, le fonds canadien Brookfield investit 20 milliards d'euros. Sans compter des initiatives d'Iliad et de Mistral.

En amont du Sommet pour l'action sur l'Intelligence Artificielle qui se tient ces 10 et 11 février, Matignon avait annoncé la semaine dernière la troisième phase de son plan IA, qui prévoit notamment la construction de 35 data centers sur tout le territoire. Dimanche soir lors du 20 Heures de France 2, Emmanuel Macron en a remis une couche, annonçant un plan d'investissement de 109 milliards d'euros" dans les années à venir". Des fonds qui doivent provenir en majeure partie du privé.

L'enjeu : montrer que la France est capable de tenir tête au projet de 500 milliards de dollars de Donald Trump (Stargate) dédié à la construction de data centers aux Etats-Unis au profit de l'IA. Le chiffre de 109 milliards n'a pas été choisi par hasard. Il est l'équivalent des 500 milliards de Trump rapporté à la population. Sur les 109 milliards annoncés, une partie ira au développement des technologies d'IA en tant que telles au-delà des data centers. Sur ce point, Bpifrance a dévoilé son propre programme d'appui à hauteur de 10 milliards d'euros.

Le principal défi ? Attirer davantage d'investissements en réduisant le temps nécessaire entre la volonté d'investir dans un data center et sa sortie de terre effective. Après de longs mois de travail avec EDF et RTE, l'Etat français est en mesure de dégager le terrain foncier nécessaire à l'accueil des 35 nouveaux centres de données annoncés (avec toutes les autorisations de raccordement au réseau électrique à partir de 2027) et de garantir l'acceptabilité publique des projets, ce dernier point ayant pu être un frein à certains chantiers par le passé. Les surfaces identifiées vont de 18 à plus de 150 hectares, pour quelque 1 200 hectares au total.

Un data center dédié à Mistral

Premier investisseur annoncé : les Emirats arabes unis. Le pays compte investir 30 à 50 milliards d'euros pour bâtir un méga-centre de données dont la capacité pourrait atteindre le gigawatt, l'un des plus importants annoncés dans le cadre du plan IA. L'emplacement de cette infrastructure n'a pas été communiqué.

Mais les Emirats arabes unis ne sont pas les seuls à s'engager financièrement dans ce vaste projet. De son côté, le fonds canadien Brookfield prévoit lui-aussi d'investir 20 milliards d'euros en France dans des infrastructures IT au profit de l'IA d'ici 2030. Selon La Tribune Dimanche, cette initiative se traduira par la construction d'un second méga-datacenter à Cambrai dont la puissance s'élèvera également à 1 gigawatt. 15 milliards d'euros lui seront consacrés. Les 5 milliards d'euros restant seront dédiés à des "infrastructures associées" visant notamment à produire l'énergie nécessaire à son fonctionnement.

" Nous avons choisi la France pour son efficacité énergétique et la qualité de son mix énergétique en matière d'émissions de carbone"

En parallèle, deux autres acteurs ont également profité du sommet pour réaliser des annonces sur le front des centres de données. La première ? La pépite française de l'IA générative Mistral disposera prochainement de son propre data center. Situé dans l'Essonne, il sera utilisé pour entraîner les modèles de la société. Arthur Mensch, fondateur et PDG de la start-up, a dévoilé le projet au journal télévisé de 20 heures de TF1 le 9 février. Il précise avoir retenu la France "pour son efficacité énergétique et la qualité de son mix énergétique en matière d'émissions carbone".

Et le PDG de Mistral de préciser : "On a également retenu la France pour la qualité de ses techniciens et la qualité de ses déploiements dans les centres de données. Pour nous, c'est un choix qu'on fait de maîtriser l'ensemble de la chaîne de valeur, c'est-à-dire de l'infrastructure machine jusqu'au logiciel, car ça nous permet d'avoir l'efficacité dont on a besoin pour créer les meilleurs modèles." Compte-tenu de la puissance nécessaire à l'entrainement des modèles de fondation, il est fort à parier que le data center Mistral se situera dans le haut du pavé en termes de puissance machine, et donc de coûts.

Des infrastructures souveraines ?

Aux côtés de Mistral, OpCore, filiale d'Iliad opérant les 13 data centers du groupe en Europe, annonce vouloir investir 2,5 milliards d'euros "afin de renforcer sa position de leader européen du centre de données à grande échelle dédié notamment aux ressources de calcul en IA". Pour ce faire, l'entreprise de Xavier Niel a noué un partenariat avec Infravia, acteur indépendant du capital investissement en Europe. OpCore entend déployer à court terme plusieurs centaines de mégawatts de capacités numériques. "Notre ambition sur le long terme est de construire plusieurs gigawatts de capacités à travers l'Europe", indique Iliad dans un communiqué. Rappelons qu'OpCore héberge l'une des trois zones de disponibilité d'AWS en France au sein de son datacenter DC3 situé à Vitry-sur-Seine (voir La carte des data centers des clouds américains en France).

Il ne reste plus qu'à espérer que les nouveaux data centers érigés en France ne soient pas dédiés à héberger les ressources de calcul des hyperscalers américains, mais qu'ils soient bien consacrés à des projets de développement européens en IA. C'est-à-dire ce pourquoi ils ont été financés.