Le procès Meta révèle les tensions entre Facebook et Instagram
Le procès antitrust contre Meta, ouvert à Washington, met en lumière les conflits internes liés au rachat d'Instagram. Le cofondateur du réseau social y accuse le groupe de Mark Zuckerberg d'avoir entravé son développement, au moment où la Federal Trade Commission remet en question les rachats de WhatsApp et d'Instagram.
Un réseau en pleine croissance, freiné après son rachat
Instagram, créé en 2010, franchit dès ses débuts les 25 000 inscriptions le premier jour, puis atteint quatre millions d'utilisateurs en 2012. Cette même année, Facebook débourse un milliard de dollars pour l'acquérir. En 2018, Instagram revendique un milliard d'utilisateurs. À cette époque, seuls 1 000 employés y travaillent, contre 35 000 pour Facebook.
Devant la cour, Kevin Systrom, cofondateur d'Instagram, affirme que la maison mère n'a pas alloué les ressources nécessaires à la croissance de l'application. Il déclare que Mark Zuckerberg refusait d'investir dans la plateforme, estimant qu'elle représentait une menace pour Facebook. "Mark n'investissait pas dans Instagram parce qu'il pensait que nous étions une menace pour sa croissance", a déclaré Kevin Systrom, cité par le New York Times. Il évoque aussi un manque de personnel et des tensions persistantes, qui ont conduit à son départ en 2018 avec Mike Krieger, l'autre cofondateur.
Le rachat d'Instagram, considéré à l'époque comme une opération exceptionnelle, est aujourd'hui perçu différemment. Le réseau représente désormais environ un tiers des revenus de Meta, ce qui rend les accusations de frein volontaire plus sensibles dans le cadre du procès.
Des documents internes évoquent un risque de "cannibalisation"
L'action en justice de la FTC repose notamment sur des échanges internes datant de 2018 à 2022. Ces documents, révélés par Business Insider, mettent en lumière l'inquiétude de Meta face à l'essor d'Instagram. Dans une lettre interne, Mark Zuckerberg écrivait : "L'application Facebook a historiquement fourni la plupart de sa croissance à Instagram. Cela a contribué à un vent contraire pour Facebook dans la mesure où il a envoyé une partie de ses utilisateurs vers Instagram". Ce constat alimentait des pistes de réflexion comme la baisse de visibilité de l'application ou un changement de direction.
De son côté, Meta conteste les accusations et affirme que l'acquisition d'Instagram lui a permis d'intégrer de nombreuses fonctionnalités nouvelles, comme les stories ou les vidéos en direct. L'acquisition a ajouté "beaucoup, beaucoup plus" de fonctionnalités, a fait valoir Kevin Huff, avocat du groupe, cité dans Libération.
Un procès sous fond de déclin pour Facebook
Les révélations s'inscrivent dans un contexte de perte d'attractivité pour Facebook, en particulier chez les plus jeunes. Des documents internes montrent que les dirigeants de Meta sont préoccupés par ce déclin depuis 2022. Plusieurs initiatives, comme un remaniement de l'onglet "amis", ont été envisagées sans résultat notable.
Le procès antitrust mené par la FTC accuse Meta d'avoir acquis Instagram et WhatsApp non pour les développer, mais pour neutraliser une concurrence potentielle. L'issue de cette procédure pourrait remettre en cause la structure actuelle du groupe.