Suppression de niches fiscales : le tri budgétaire commence

Suppression de niches fiscales : le tri budgétaire commence Alors que le besoin d'économies se chiffre en dizaines de milliards, les avantages fiscaux trop anciens, peu efficaces ou trop ciblés pourraient être les premiers concernés.

Le gouvernement a engagé un travail d'identification des dépenses fiscales peu utilisées ou considérées comme obsolètes, avec l'objectif de réduire le coût global de ces dispositifs pour le budget 2026.

Des avantages fiscaux nombreux, concentrés et inégalement distribués

Selon le tome II de l'annexe "Voies et moyens" du projet de loi de finances pour 2025, les dépenses fiscales atteindront 85,1 milliards d'euros cette année, contre 83,3 milliards en 2024 et 82,9 milliards en 2023. Ce montant, relativement stable en proportion du PIB depuis 2013 (entre 3,4% et 3,6%), couvre 474 dispositifs, dont 65 en cours d'extinction.

Près de la moitié de ces dépenses concernent l'impôt sur le revenu (49%), suivi de l'impôt sur les sociétés (16%) et de la TVA (14%). Quinze dispositifs concentrent plus de la moitié du coût total. Le crédit d'impôt recherche (CIR), qui soutient les investissements en R&D, représente à lui seul 7,7 milliards d'euros. Viennent ensuite le crédit d'impôt pour l'emploi à domicile (6,9 milliards) et l'abattement de 10% sur les pensions de retraite (près de 5 milliards).

Amélie de Montchalin, ministre des Comptes publics, a déclaré vouloir examiner les "dizaines" de niches fiscales qui ne bénéficient qu'à "moins de 100 contribuables", affirmant que "si on supprime beaucoup de niches, on fera des baisses d'impôts pour tout le monde", au micro de TF1, comme le rapporte Le Figaro.

Des dispositifs ciblés, parfois sans bénéficiaire

Un rapport de la Cour des comptes publié en 2023 dénombrait 184 dispositifs fiscaux représentant chacun entre 1 et 50 millions d'euros, pour un coût cumulé de 2,5 milliards. Soixante d'entre eux coûtaient moins de 500 000 euros par an. Certains dispositifs n'ont même plus de bénéficiaires selon BFM Business : 36 niches n'étaient plus utilisées, comme l'exonération de droits de mutation pour les dons d'œuvres d'art à l'État.

Le document budgétaire 2025 mentionne aussi des dispositifs à très faible portée. Seuls 26 bénéficiaires pour la déduction en faveur des simulateurs d'apprentissage de la conduite, 12 entreprises pour l'exonération de CVAE en zone rurale, 51 foyers pour l'exonération d'impôt sur l'indemnité de départ volontaire dans le cadre de restructurations du ministère de la Défense, et 19 ménages pour l'exonération des successions de policiers ou gendarmes décédés en service.

Éric Lombard, ministre de l'Économie, a confirmé que "le sujet est sur la table", ajoutant que "pour le moment, le gouvernement pose la question".

Un objectif d'économies sans augmentation d'impôts affichée

L'exécutif a exclu une hausse des prélèvements obligatoires pour 2026, tout en cherchant 40 milliards d'euros d'économies. La ministre des Comptes publics a indiqué que supprimer 10% des dépenses fiscales actuelles permettrait de récupérer environ 8 milliards. François Lenglet, sur RTL, rappelle que "réduire les avantages fiscaux, c'est par définition augmenter les impôts", soulignant le caractère implicite de la mesure sur le niveau d'imposition réel.

Dans les faits, la suppression des trois quarts des niches les moins coûteuses ne permettrait d'économiser que 4,7 milliards d'euros, selon les données de la Cour des comptes. Le reste des économies ne pourrait être atteint qu'en révisant certains dispositifs plus significatifs.

Amélie de Montchalin a néanmoins précisé qu'il ne s'agissait pas de revenir sur les aides aux services à la personne ou à la garde d'enfants, estimant qu'il fallait plutôt cibler "ce qui n'est pas efficace, ce qui bénéficie à quelques-uns, ce qui correspond à l'économie d'il y a 15 ou 20 ans".