Face à Donald Trump, la BCE accélère sa politique monétaire de soutien

Face à Donald Trump, la BCE accélère sa politique monétaire de soutien Les dernières données économiques plaident pour un nouvel assouplissement monétaire, au moment où les tensions commerciales pèsent sur les prévisions de croissance.

La Banque centrale européenne s'apprête à trancher ce jeudi après-midi sur une nouvelle baisse de ses taux directeurs, dans un climat de forte incertitude lié à l'offensive commerciale américaine.

Une orientation monétaire dictée par les tensions douanières

La probabilité d'une nouvelle baisse des taux a fortement progressé ces derniers jours. Alors que la BCE semblait vouloir marquer une pause après six allègements depuis juin 2024, le durcissement de la politique commerciale des États-Unis a rebattu les cartes. À 14h30, la présidente Christine Lagarde pourrait annoncer un nouveau recul du taux de dépôt, actuellement fixé à 2,5%, possiblement abaissé à 2,25%.

Selon les anticipations relayées par Les Échos, les marchés tablent sur un nouvel assouplissement d'un quart de point. Cette orientation s'appuie sur un ralentissement de l'inflation en zone euro, mesurée à 2,2% sur un an en mars. Le repli des prix de l'énergie et l'appréciation de l'euro contre le dollar ont contribué à atténuer les pressions inflationnistes, offrant plus de flexibilité à la BCE.

Dans le même temps, l'économie européenne est exposée à un choc externe. Donald Trump a mis en œuvre début avril des surtaxes pouvant atteindre 25% sur plusieurs catégories de produits européens. Bien que certaines contre-mesures aient été suspendues, les taxes toujours en vigueur concernent 52 milliards d'euros d'échanges, a rappelé Emmanuel Macron sur X.

Croissance affaiblie, demande de crédit en recul

Les projections d'impact économique sont incertaines mais convergentes. Selon Christine Lagarde, la zone euro pourrait subir une contraction de 0,3% de son PIB dès la première année en cas de maintien des barrières douanières, et de 0,5% si une riposte européenne est déclenchée. L'institut IFW Kiel évalue de son côté à -0,2 point l'effet sur le PIB européen, contre -1,7 point pour les États-Unis.

La guerre commerciale pèse également sur le moral des ménages et la demande des entreprises. Klaas Knot, gouverneur de la Banque centrale des Pays-Bas, déclarait la semaine dernière que "le choc le plus important et le plus dominant est un choc négatif de demande dû à l'effet de confiance". La dernière enquête de la BCE sur le crédit montre en effet un recul de la demande de prêts de la part des entreprises au premier trimestre, soit avant même les dernières annonces américaines.

Luis de Guindos, vice-président de la BCE, a estimé que la politique commerciale de Washington rendait l'environnement économique "encore plus incertain qu'il ne l'était à l'époque de la pandémie de Covid-19".

Une décision guidée par les données économiques

La BCE devrait rappeler sa position de dépendance aux données ("data-dependent") dans les décisions à venir. Selon François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, cité dans Le Figaro, "les changements depuis le 2 avril plaident de fait plutôt pour une baisse". Il précise que cette baisse doit être fondée "sur les données économiques" et conduite "aussi vite qu'il est justifié".

Les marchés s'attendent désormais à ce que le taux de dépôt tombe à 1,50-1,75% d'ici fin 2025, selon les estimations de Morningstar. Ce scénario suppose au moins trois baisses supplémentaires après celle potentiellement attendue ce jour.

Christine Lagarde a affirmé vendredi dernier que la BCE était "prête à intervenir" en cas de risque pour la stabilité financière. Claudia Buch, à la tête du superviseur bancaire de la BCE, a pour sa part précisé dans Bloomberg que les marchés de la zone euro ne présentaient actuellement "aucun signe de tension de liquidité".