Dette publique : un nouveau sommet historique atteint fin 2024
Fin 2024, la dette publique française a franchi un cap inédit, atteignant 3 305,3 milliards d'euros, selon les données publiées ce 27 mars par l'Insee. Ce montant équivaut à 113% du produit intérieur brut (PIB), un niveau jamais atteint hors période de crise sanitaire ou économique.
Une dette en hausse continue
En 2024, le déficit public s'est établi à 5,8% du PIB, contre 4,4% initialement anticipés. Le solde budgétaire est toutefois légèrement meilleur que les prévisions révisées de début d'année, qui évoquaient un possible dépassement des 6%.
Le ministre de l'Économie, Éric Lombard, a déclaré sur France Inter : "Ça n'est pas une bonne nouvelle, c'est un déficit trop élevé, c'est pourquoi nous devons le réduire", à l'occasion d'une interview citée par Le Figaro.
Selon l'Insee, les dépenses publiques ont augmenté de 3,9% en valeur en 2024, pour atteindre 57,1% du PIB. Les recettes, elles, n'ont progressé que de 3,1%. Le poids croissant de certaines charges structurelles, notamment les prestations sociales, pèse fortement sur les comptes. Ces dernières représentent à elles seules 60% de la hausse des dépenses. Les seules prestations sociales ont crû de 5,5% sur un an, soit un surcoût de 39,1 milliards d'euros.
La charge de la dette a elle aussi connu une progression importante, en raison de la remontée des taux d'intérêt. En 2025, elle devrait s'élever à 55 milliards d'euros, selon la loi de finances votée en février. La Cour des comptes anticipe une charge de 112 milliards en 2029, soit le premier poste budgétaire devant l'Éducation nationale. Le taux d'emprunt français à dix ans atteint désormais 3,5%, contre des taux compris entre 0% et 1% durant les années 2010.
Un endettement durablement élevé, sans inflexion avant la fin de la décennie
La dette publique française semble partie pour continuer de croître dans les années à venir. D'après Fitch Ratings, elle pourrait atteindre 120% du PIB en 2028. La Cour des comptes évoque une trajectoire allant jusqu'à 125% du PIB en 2029, et près de 130% dès 2031. Cette dynamique s'explique par un déficit structurel persistant, mais aussi par de nouvelles dépenses liées à la défense.
Le Premier ministre François Bayrou a insisté dans un message adressé le 21 mars aux parlementaires, cité par Le Monde : "Le rétablissement de nos finances publiques est un devoir moral envers nos concitoyens, en particulier ceux qui travaillent, les plus jeunes et les enfants". Malgré cet engagement, les prévisions inscrites dans le projet de loi de finances 2025 tablent sur une dette atteignant 115,5% du PIB à la fin de l'année.
Le projet de réarmement, évoqué à plusieurs reprises par Emmanuel Macron, pourrait accentuer cette tendance. Si le budget consacré à la défense était porté à 3% ou 4% du PIB, cela alourdirait encore le déficit. L'agence Morningstar DBRS estimait, dans une note datée du 21 mars, que "l'augmentation des dépenses de défense pourrait exercer une pression à la hausse sur le déficit budgétaire à moyen terme".
Par ailleurs, la perspective d'une mutualisation européenne des mécanismes de financement n'est pas exclue. Luiz Awazu Pereira da Silva, ancien vice-gouverneur de la Banque centrale du Brésil, aujourd'hui professeur à l'OFCE, souligne dans une note que "le risque d'une spirale du coût croissant de remboursement n'est pas anodin, mais doit être comparé au risque de ne rien faire face aux défis ou de n'y répondre que partiellement".