Jean-François Bernard (Adomik) "Les investissements en display en France sont en baisse de 10% au premier trimestre"
Une claque d'autant plus rude que les CPM aussi baissent, de 11% sur la même période, selon Jean-François Bernard, cofondateur d'Adomik

JDN. Les investissements sur l'open web sont en baisse de 10% au premier trimestre 2025, selon les chiffres d'Adomik.
Jean-François Bernard. Le marché du digital sur l'open web recule en ce début d'année, c'est un fait. Les investissements en display (bannières et vidéo en ligne hors YouTube, chaînes TV et plateformes de streaming, ndlr) ont baissé de 10% au premier trimestre 2025 comparé au premier trimestre 2024. C'est considérable surtout que la valeur même des inventaires a, elle aussi, perdu : -11% sur la même période. Cette érosion de la valeur est liée notamment à la baisse des volumes investis en programmatique garanti.
De quoi affecter également les grandes régies premium, qui se servent fortement du programmatique garanti…
Ce qui passe en programmatique garanti est de fait ce qui se vend cher, c'est-à-dire les meilleurs inventaires : formats vidéo et meilleurs emplacements chez des régies premium en effet. Alors que l'open auction est déjà relativement bas, même s'il baisse lui aussi, si le CPM moyen baisse, cela prouve bien que le programmatique garanti a lui aussi fortement reculé.
Pourquoi de telles baisses d'après vous ?
Cette tendance fortement baissière était déjà pressentie à la fin de l'année dernière quand le marché a commencé à freiner après la parenthèse des Jeux. C'est une suite logique. Elle s'inscrit dans une tendance de fond qui est défavorable à l'open web. Le fait est que depuis le début de la guerre en Ukraine et l'épisode inflationniste observé en France en 2023, les annonceurs veulent mesurer les retours obtenus pour chaque euro investi en publicité. Cette exigence a toujours existé, mais elle s'est accrue ces dernières années. Or, c'est précisément ce que les Gafam leur procurent : la data, la performance et l'attribution. Ce n'est pas un hasard si leur part du gâteau, qui est déjà massive, continue de croître. Je ne pense d'ailleurs pas que cela reflète déjà l'impact des décisions prises par l'administration Trump d'imposer des droits de douane prohibitifs au monde entier.
Est-ce que cela peut encore s'aggraver avec la crise qui s'installe à la suite des décisions de l'administration Trump ?
Au-delà de l'impact direct qu'elles peuvent avoir sur l'économie, les récentes décisions prises par l'administration américaine créent de l'incertitude et par conséquent un climat qui ne me semble pas favorable à une reprise des investissements sur l'open web. La raison est que ces décisions peuvent renforcer encore davantage les Gafam, les annonceurs orientant leur budget vers le triptyque data, performance et attribution évoqué plus haut.
Mais ce n'est pas tout : en cas d'une nouvelle pression haussière sur les prix des biens et de services, les consommateurs pourraient s'orienter davantage vers les services notamment vidéo gratuits ou subventionnés par la publicité, renforçant la migration de budgets marketing vers les plateformes au détriment des publishers plus traditionnels.
Ceci étant, toute prévision reste compliquée à ce stade dans la mesure où l'actualité évolue très vite, notamment sur le sujet des droits de douane.
Quel est le périmètre couvert par vos chiffres ?
Ces chiffres couvrent les investissements en display (bannière et vidéo en ligne) sur 1 500 sites et applications commercialisés par 80 régies sur le territoire français, dont 40 régies du top premium. Sont exclus de cette analyse l'audio, YouTube et les inventaires des chaînes TV et des plateformes de streaming.