Franck Lewkowicz (PubMatic) "PubMatic a enregistré une hausse de 140% des investissements en curation en 2024"
Franck Lewkowicz, directeur général de PubMatic en France, défend le modèle des curated marketplaces en précisant comment il peut s'avérer vertueux pour les annonceurs et les éditeurs.
JDN. En France, les curated marketplaces ne représentent que 3,7% des investissements (données Adomik : 22 SSP, 80 régies, 1500 sites, 2024). Vous souhaitez apporter un autre éclairage à ce chiffre, lequel ?

Franck Lewkowicz. Je voudrais partager ce que nous observons chez nous, au sein de PubMatic en France, en effet : la part des investissements qui sont dédiés aux curates deals chez nous est au moins 2 à 3 fois supérieure à ce pourcentage de 3,7%. Autre illustration : alors que le Baromètre du programmatique fait état d'une hausse de la curation de 23% en 2024, chez nous cette évolution est de 140% (data comprise). Le SPO (supply path optimization, ndlr) représente d'ailleurs 53% de nos revenus en 2024.
Cette différence est sans doute due au fait que les chiffres marché sur lesquels vous vous basez ne représentent pas l'intégralité des régies avec lesquelles nous travaillons. Mais également pour des raisons techniques : toutes les impressions qui passent en curated ne sont pas nécessairement remontées en tant que telles, elles peuvent être considérées à tort comme étant en open auction.
Cela arrive mais lorsque les impressions sont vendues par des resellers positionnés entre l'éditeur et le SSP. Vous le confirmez ?
Oui cela peut en effet être une explication, sachant qu'on limite les resellers à un ou deux "hop". Notez que la lutte contre le trop plein d'intermédiaires, très légitime, n'interdit pas d'avoir recours aux resellers lorsque ces derniers viennent injecter de la valeur à l'inventaire, bien au contraire. C'est notamment le cas pour la data, les optimisations algorithmiques ou la visibilité, un des atouts majeurs des curated deals.
Rappelons que la curation offre à l'acheteur la possibilité de sélectionner un cadre de diffusion ultra précis, de choisir le chemin le plus direct vers l'impression (SPO), d'associer de la donnée à l'inventaire, le tout à partir du SSP. Ce dernier génère un deal que le DSP de l'annonceur exécutera, et il peut même être activé directement depuis notre propre outil d'achat.
Le buy side nous explique que les curated marketplaces peinent à s'imposer comparé aux deals pour le branding ou à l'open auction pour la perf…
Il faut savoir que lorsque la donnée est injectée côté sell side pour le ciblage, grâce aux curated, les annonceurs observent beaucoup moins de déperdition que quand cela se passe au niveau des DSP. Ceci étant, pour que les curated soient attractives, je vois trois conditions majeures en effet. Tout d'abord, la plateforme doit être ergonomique et très proche de ce que les acheteurs ont l'habitude d'utiliser. Ensuite, elle doit être connectée à un maximum de data providers, pour répondre au maximum aux objectifs de ciblage (sociodémo, comportemental, géolocalisation, retail…). Enfin, son modèle économique doit être pertinent et transparent. Il y a là un atout très fort car la curation donne aux acheteurs la vue sur ce qu'ils achètent, sur la supply.
Le buy side considère que, pour être attractives, les curated doivent proposer des données exclusives. Qu'en pensez-vous ?
La donnée est de moins en moins exclusive en réalité. Les data providers, dont les retailers, ont besoin de se connecter à un maximum d'acheteurs et de plateformes pour rendre viable leur modèle économique. Ce qui compte, c'est de pouvoir y accéder facilement en la combinant avec un maximum de critères et de formats possibles (mobile, app, CTV, etc.). Surtout, ce qui est stratégique pour les éditeurs et les acheteurs, c'est de varier les plateformes qui seront plus ou moins fortes sur des formats et géographies différentes. Par exemple, certains gros publishers de la CTV savent qu'en se connectant à PubMatic, ils attireront plus facilement les campagnes internationales qui sont vendues en France, parfois même diffusables avec un CPM plus élevé que la moyenne nationale.
Le buy side et les régies critiquent aussi la curation parce qu'elle offrirait des niveaux de revenus bas aux éditeurs, les meilleures opportunités partant en PG ou en preferred deals. Que leur répondez-vous ?
Les éditeurs doivent absolument pouvoir s'y retrouver. Ce que nous constatons chez nous, c'est que l'eCPM obtenu en curation est en moyenne de 25% supérieur à ce qui est obtenu sur l'open auction. C'est sans doute lié en partie au modèle économique des plateformes proposant de la curation. A inventaire équivalent, PubMatic ne prend pas de commission additionnelle sur la curation.