2021, l'année de la customer data platform
C'est un véritable boom. L'offre de customer data platform (CDP) ne cesse de monter en puissance ces derniers mois. Evidemment, le contexte est porteur. La pandémie de Covid-19 remet sur le devant de la scène l'urgence de digitaliser les canaux de vente ou de renforcer cette digitalisation si elle est déjà engagée. Derrière ces stratégies, se profile le besoin d'un socle unifiant les informations commerciales, marketing et issues du service client. L'enjeu ? Mettre en œuvre une communication sans couture pour les clients quel que soit le canal. Et c'est là que la CDP entre dans la danse.
Ces dernières semaines, les levées de fonds se succèdent à un rythme effréné. Début février, le californien Tealium a annoncé un tour de table de 96 millions de dollars. Baptisée Customer Data Hub, son offre agrège, grâce à une large bibliothèque d'API, des données de multiples sources : sites web, apps mobiles, guichets physiques, serveurs... Puis, elle unifie les profils clients, leur alloue des attributs personnalisés et les segmente. Objectif affiché : leur appliquer en bout de course des scores prédictifs pour procéder ensuite à un ciblage omnicanal.
Compatible avec les services de streaming de données des clouds d'Amazon, de Google et de Microsoft, Tealium a construit sa propre couche de machine learning baptisée Predict ML. Avec un bureau à Paris, l'entreprise de San Diego, désormais valorisée 1,2 milliard de dollars, compte passer de 500 à 750 salariés à moyen terme avec la volonté d'étendre sa présence à l'international.
Mariage avec l'IA
A peine quelques jours plus tard, c'est au tour de Leadspace d'officialiser une levée de 46 millions de dollars. Basée à San Francisco, cette société est classée leader des CDP orientées BtoB par Forrester aux côtés de Lattice Engines. Parmi ses références, Leadspace revendique American Express, Microsoft, Salesforce, Verizon ou encore Zoom. Comme Tealium, elle mise sur le machine learning. "Dans les prochaines années, les CDP seront considérées comme un nouveau levier permettant, grâce à l'IA, d'obtenir la véritable identité des clients que ce soient des entreprises ou des particuliers", anticipe Alex Yoder, CEO de Leadspace, nommé à l'occasion de l'opération.
Fin février, rebelote : Blueshift finalise un tour de table de série C de 30 millions de dollars. Egalement originaire de San Francisco, cette plateforme de données clients, là encore équipée d'une IA orientée marketing omnicanal, a débuté sa conquête de l'Europe par l'ouverture d'une implantation à Londres. Côté références, elle affiche la BBC, Groupon, Paypal ou OpenClassrooms.
Et ce n'est pas fini. Toujours fin février, Lexer a bouclé une séries B de 25,5 millions de dollars. Suite à l'opération, l'éditeur australien annonce vouloir ouvrir sa customer data platform aux grands groupes. Autre enjeu affiché par l'entreprise de Melbourne : accroître sa présence aux Etats-Unis et en Asie du Sud-Est. Pour l'heure, l'Europe n'est pas à l'ordre du jour.
420 millions levés en quelques semaines
Dernière opération de financement en date : la levée de dette de 222,5 millions de dollars dévoilée par Zeta Global le 1er mars 2021. Licorne historique de la customer data platform aux Etats-Unis, cette pépite a été cofondée par John Sculley, ex-CEO d'Apple. De la publicité programmatique à la télévision connectée, elle se caractérise par la richesse des canaux de relation client qu'elle prend en charge. Implantée en France, Zeta Global place également la gestion des données d'identité et l'IA prédictive parmi ses marques de fabrique.
Résultat des comptes, les cinq acteurs précédemment cités totalisent 420 millions de dollars de fonds levés, et ce en à peine quelques semaines. Un chiffre record. Selon le Customer Data Platform Institute, ce chiffre atteignait 101 millions de dollars sur l'ensemble de l'année 2020, et 146 millions de dollars en 2019.
Adode, Salesforce, SAP et Microsoft
Aux côtés d'Adobe, porte flambeau historique de la CDP, les géants américains des applications d'entreprise n'ont pas attendu cette vague de levées de fonds pour avancer leurs pions sur l'échiquier. Premier à dégainer suite à la première vague du Covid, Microsoft a renforcé son offre de CDP dès le 1er octobre. Elle est intégrée pour l'occasion à son service cloud Azure Synapse Analytics en vue de bénéficier des capacités d'analyse prédictive de ce dernier. Pile au même moment (hasard de calendrier ?), Salesforce lance sa customer data platform en version finale. Baptisée Customer 360, elle fédère les données issues de ses différentes briques : Sales Cloud, Marketing Cloud, Service Cloud et Commerce Cloud. Une semaine plus tard, Oracle répond du tac au tac en mettant à jour sa CDP en vue notamment de la rendre mieux adaptée au BtoB.
Mi-octobre, nouveau coup de théâtre : le géant américain des API de communication multicanale Twilio met la main sur Segment, l'un des acteurs historiques du marché. L'acquisition est estimée à 3,2 milliards de dollars. Fort de ce rachat, le Californien entend accroître la valeur de son offre en lui adjoignant une couche de data management intelligente visant à améliorer le ciblage client. Pratiquement au même moment, l'éditeur allemand SAP annonce la sortie de sa propre solution de CDP (baptisée SAP Customer Data Platform) avec comme cible l'hyperpersonnalisation marketing. 24 heures après, Treasure Data, un pure player très apprécié, dévoile son kit de développement in-store, ajoutant ainsi une nouvelle corde à son arc.
Selon le CDP Institute, le marché de la customer data platform est passé de 1 milliard en 2019 à 1,3 milliard de dollars en 2020. Et pour 2021 ? L'institut anticipe 1,55 milliard de dollars. Au dernier pointage, il répertorie au total 133 fournisseurs positionnés sur le segment de la CDP. La bataille est bien engagée, mais encore loin d'être remportée.